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Page:Hazard – Discours sur la langue française, 1913.djvu/48

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ils ne sont pas un million. Les contredire est dangereux ; car le grand esprit de prosélytisme dont ils sont animés ne va pas sans violence, et ils lancent volontiers l’anathème contre ceux qui refusent de partager leur espoir. Souvent des scissions se produisent entre eux. Comme ils sont à la poursuite d’une algèbre intellectuelle, il se trouve toujours quelqu’un pour proposer des équations plus parfaites ; les uns les adoptent, parce qu’ils se piquent de rester fidèles à leur système, qui est de supprimer le réel au profit du logique ; les autres ne veulent pas les recevoir, parce qu’ils sentent bien qu’à changer toujours on finira par compter autant de langues parfaites que d’individus ; ce qui n’est pas leur but. Alors les fils dégénérés prétendent tenter leur propre fortune. Les grammaires restent, les écoliers s’en vont.

Mais si les résultats pratiques ne répondent pas à l’effort déployé, la tendance est dangereuse, et il importe de la signaler. Que d’autres pays la favorisent, nous le comprenons aisément. Partout où l’on parle une langue qui n’a aucune chance de se répandre au dehors, on est fort aise d’encourager un