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Page:Hegel - Système des beaux-arts, t. 2, trad. Bénard, 1860.djvu/14

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introduction.

de l’art romantique. En effet, dans la peinture, l’apparence visible, est bien encore, il est vrai, le moyen par lequel l’esprit se manifeste ; mais le véritable fond de cet art, c’est la subjectivité intérieure, l’âme détachée de son existence corporelle pour se replier en elle-même ; c’est la passion et le sentiment dans ce qu’ils ont de plus intime, le caractère moral. Ce sont les affections profondes du cœur qui passent tout entières dans la forme extérieure où se reflètent les pensées les plus secrètes de la conscience. C’est l’esprit lui-même, occupé de ses propres situations, des fins qu’il poursuit et des actions qu’il réalise. À cause de ce caractère tout intime qui distingue le fond de la peinture, elle ne peut plus se contenter d’employer, comme moyen d’expression, la matière réelle non particularisée et soumise encore aux lois de l’équilibre et d’en façonner simplement la forme ; elle doit se choisir un autre mode de représentation sensible, la simple apparence, en y joignant la couleur. Cependant la couleur elle-même appartient toujours aux formes étendues, telles qu’elles s’offrent dans le monde réel : elle les fait ressortir et les rend visibles. L’art de peindre va, sans doute, jusqu’à la magie du coloris, etc. Ici le côté réel de la forme visible commence à disparaître, l’effet, en quelque sorte, n’est plus produit par quelque chose de matériel. Mais, à quelque degré que la peinture s’affranchisse par là du réel, bien qu’elle ne s’arrête plus à la forme en elle-même, bien qu’il lui soit permis de se développer librement dans son propre élément, dans le jeu de l’appa-