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Page:Hegel - Système des beaux-arts, t. 2, trad. Bénard, 1860.djvu/42

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des effets de la musique.

entre elle-même et celui dont elle frappe les oreilles et qui doit la goûter. En effet, les sons qui résonnent au dehors ont une existence indépendante de l’âme qui les entend. Mais cette opposition ne va pas, comme dans les arts figuratif, Jusqu’à la fixité d'un spectacle permanent, durable, extérieur, qui permet de contempler des objets existant par eux-mêmes. Au contraire, le caractère des sons est l’instantanéité ; c’est de disparaître et de se succéder rapidement sans laisser de trace après eux. D’autre part, la musique n’effectue pas la séparation du signe et de l’idée, comme la poésie, dans laquelle la pensée se montre indépendante des sons de la parole, et qui, seule entre tous les arts, a le privilège d’offrir à l’esprit une série d’idées et d’images distinctes des formes qu’affecte leur expression. On pourrait, sans doute, objecter que la musique aussi, d’après ce que j’ai dit plus haut, peut affranchir les sons de leur signification et les rendre par là libres ; mais cet affranchissement n’est pas, à proprement parler, le but sérieux de cet art. Celui-ci au contraire, consiste à faire concourir toutes les ressources de l’harmonie et de la mélodie à l’expression du sujet choisi et des sentiments qu’il est capable d’exciter. Maintenant, comme l’expression musicale réside à la fois dans le sens intérieur du sujet, dans lé sentiment qu’il éveille, ainsi que dans le son, ce phénomène fugitif et instantané qui échappe à la figure et à l’étendue, elle pénètre immédiatement au foyer intérieur des mouvements de l’âme. Elle s’en empare tout entière ; et celle-ci n’é-