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Page:Hegel - Système des beaux-arts, t. 3, trad. Bénard, 1860.djvu/32

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avec elle. Sous ce rapport, donc, la poésie lyrique peut facilement tomber dans cette fausse prétention, que tout sentiment personnel et particulier doit intéresser par lui-même. — Par opposition, on peut nommer poésies de société plusieurs pièces de vers de Goethe, quoiqu’il ne les ait pas désignées sous cette rubrique. Dans la société, en effet, on ne se met pas en avant soi-même ; au contraire, on s’efface, on retire sa personnalité et l’on intéresse par un tiers, par une histoire, une anecdote, les traits empruntés à d’autres, mais que l’on saisit avec esprit et originalité, et que l’on représente suivant le ton et la manière qui nous est propre. Dans ce cas, le poëte est lui-même et n’est pas lui-même. Il ne se donne pas pour ce qu’il y a de mieux, il se métamorphose. C’est, en quelque sorte, un acteur qui joue une infinité de rôles différents ; il s’arrête tantôt ici, tantôt là ; dessine rapidement ici une scène, là un groupe ; et, cependant, quoi qu’il représente, il mêle toujours au sujet, d’une manière vivante, son propre, sentiment artistique, sa manière de voir et sa vie personnelle.

Mais, maintenant, si le sentiment intérieur est la véritable source de la poésie lyrique, elle doit conserver le droit de se borner à l’exprimer comme tel, sans le développer dans une situation dela vie, et le représenter sous une forme extérieure. Sous ce rapport, cependant, les paroles qui n’ont pas de sens, comme celles d’un vague refrain, le chant pour le chant, comme satisfaction purement lyrique, où les mots ne sont qu’un véhicule