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GŒTHE



Si la paix était possible sans Dieu. Gœthe l’eût conquise et donnée au monde. Le jour où Napoléon s’arrêta devant lui pour dire : « Monsieur Gœthe, vous êtes un homme, » ce jour-là mit en présence deux hommes dont les destinées, si elles s’étaient croisées en un certain sens dans le monde invisible, auraient pu produire dans le monde visible des combinaisons extraordinaires. Tous deux en naissant avaient reçu la force sous deux formes différentes, qui pouvaient devenir les deux accords d’une harmonie merveilleuse.

Ne parlons que de Gœthe. Peu d’hommes sont aussi difficiles à saisir : il n’a laissé nulle part la forme complète de sa pensée. Il ne nous a pas donné le résumé de lui-même. Poète, philosophe, romancier, critique, que n’a-t-il pas été ? Et dans toutes les routes où il a marché, il a marché seul. Son nom a rempli le monde, et il n’a pas eu un disciple. Aucune école ne le réclame comme sien. Sur la surface de la terre, nul ne peut dire : Gœthe est avec moi, ni même : Je suis avec Gœthe, car son nom, qui réveille tant de choses, n’en personnifie cependant aucune. Nulle doctrine, philosophique ou littéraire, ne s’est abritée