Page:Hello-Les Plateaux de la balance, Perrin, 1923.djvu/58

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ration des autres et la sienne. Il se trouvait trop grand pour agir. Ses yeux contractèrent une certaine maladie, en vertu de laquelle toutes choses prirent pour lui des proportions colossales. Voltaire avait cru que l’homme était un nain. L’homme de 1830 coudoya continuellement, dans la rue du Bac, des géants. Le moindre garçon qui sortait du collège armé de quelques rimes, apparut à lui-même et à ses amis comme un Titan foudroyé, et, comme aux cris de ce Titan les comètes n’ébranlaient pas en frémissant leur chevelure d’or, le grand homme devait à sa grandeur d’allumer un réchaud pour le venger des astres.

Épris d’amour pour les étoiles, il attendait d’elles un vague bonheur. Avec une ingratitude monstrueuse les étoiles le laissaient sans consolation : de là le réchaud ou les tours Notre-Dame. Il était de bon goût de se précipiter. Un homme suspendu à une corniche, entre le ciel et la terre, et tout près de tomber, eût fait commettre à un romantique timide, en 1830, d’épouvantables péchés d’envie.

Les pâles amateurs de choses funèbres ont promené longtemps au bord des lacs leur deuil prétentieux ; puis se rencontrant avec leurs longs cheveux et leurs figures mélancoliques sous l’ombre des saules pleureurs, ils ont imité les augures, et voilà le rire qui est revenu.

Impossible à l’homme de jouer longtemps la même comédie, son masque tombe ; im-