Page:Hennique - Pœuf, 1899.djvu/70

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
56
POEUF.

table et native bienveillance n’avait au fond pas cessé de me toucher. Je l’entendais respirer, marcher, siffler, cracher gras comme autrefois ; je le revoyais avec son nez plein de poils, sa barbe grise, ses oreilles moussues, son large poitrail, et je l’avais aimé si vivant qu’il m’était impossible de me le figurer immobile, blême, tué à son tour, dans un cercueil pareil à celui de Barrateau.

Lorsque mon père revint de la caserne, tard, — on sonnait la retraite, — Pœuf était condamné à la dégradation militaire et à la peine de mort.

Je pensai : heureusement, ce n’est pas Marie qu’on sort de condamner ! puis, me réfugiant auprès de ma mère, tout pénétré d’un obscur désir de me mêler à elle, tout frémissant d’un subtil besoin de protec-