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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

cette coquetterie, cependant risquée sans calcul. De toutes parts, aussitôt, des hommages lui vinrent. Les hommes s’empressaient autour d’elle. À peine eut-elle un sentiment des regards jaloux que lui adressaient certaines femmes,

Les fenêtres, donnant sur un jardin noir qu’éclairaient ça et là quelques grosses lanternes, laissaient entrer dans les salons un air paresseux qui n’y répandait nulle fraîcheur. Bien des figures semblaient gênées par l’orage prochain. Hélène, pourtant, loin d’éprouver un malaise quelconque, s’épanouissait dans l’illusion vraiment délicieuse d’assister, sous la Ligne, à un bal créole et se grisait du parfum lourd que mêlaient des roses à de sourds aromes de chairs moites. Plaisir pénétrant, plaisir fort, en matière de jouissance, une révélation ! Et quel pouvoir inconnu d’elle avait cette musique ! Jaillissant d’une touffe de plantes vertes, elle éveillait dans sa personne des correspondances qui la situaient au rang si doux d’une esclave heureuse. La veille encore, un tel vertige, noté chez autrui, lui aurait paru ridicule. Elle y cédait et comprenait qu’on le recherchât, que l’on en devint insatiable.

Cependant, son visage se rembrunissait toutes les fois qu’en dansant elle frôlait Michel. Était-ce curieux, cette impression blessante comme un choc ! Toujours mesuré, toujours froid, il projetait sur son bonheur une ombre irritante. Assez adroite pour lui sourire lorsqu’il l’observait, elle dévorait d’un seul regard, presque avec rancune, ces tempes