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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

dégarnies, cette peau jaune, ces lèvres molles qui découvraient, en se disjoignant, des dents déchaussées d’arthritique et ces narines d’où s’échappaient des poils durs et gris. Les yeux, surtout, la pénétraient d’une vive amertume. « C’est là mon mari ! » songeait-elle. Déjà reprise par la musique et par l’atmosphère, elle cessait de penser presque au même instant, mais ses regards se répandaient sur les figures d’hommes qu’elle savait être les époux de femmes de son âge. Aucun, sans doute, n’était vraiment distingué d’elle. Tous, pourtant, lui causaient comme une jalousie. Les plus insignifiants, les plus médiocres avaient cet air d’animation, cette seconde jeunesse que, sur les traits du commandant, elle cherchait en vain, qui paraissaient incompatibles avec sa personne et qu’elle n’y avait jamais vus. Rapprochés de leurs femmes, ils formaient des couples où l’on sentait qu’un lien charnel pouvait exister. Si de tels hommes, dans leurs ménages, par leur seule présence, n’apportaient pas tous le bonheur, tous en avaient offert les gages, tous permis l’espoir, aucun n’était d’une apparence à le mettre en fuite comme le crépuscule chasse le jour. Leurs gentillesses pouvaient donner de ces émotions qui se traduisent par une offrande spontanée du corps et, souvent, se terminent par un dîner fin. Avec eux, des élans demeuraient possibles. Telles étaient, mais confuses, mais mal enchaînées (figurez-vous des notes sommaires qu’on jette sur une feuille à grands intervalles l’une de l’autre) les idées qui,