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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

doté du même privilège son long visage, assurément d’une grande distinction, mais ravagé, parcheminé, déjà d’un vieillard. Des yeux très doux, en même temps froids et d’une fixité ombrageuse, dont les paupières faisaient penser à celles d’un reptile, flanquaient un nez cadavérique, taillé en bec d’aigle, qui retombait douloureusement sur une bouche amère. Le front haut, resserré, sans animation, rejoignait un crâne dégarni et, de l’ensemble, il émanait cet air de vertu qu’on pourrait baptiser le comique des tristes.

Entre le mûr Michel Soré et sa très jeune femme, si tout n’était pas dissemblance, c’était peut-être à la façon dont ils étaient mis qu’un pénétrant observateur l’aurait soupçonné. Une élégance méticuleuse, chez l’un comme chez l’autre, excluait toute parure, tout enjolivement, toute audace dont la mode eût été flattée par un sacrifice au bon goût. Le veston de Michel, le costume d’Hélène, tous deux d’étoffes légères et sombres, avaient ces longues lignes où se lit mieux l’art d’un tailleur ou d’une couturière qu’aux ajustements compliqués. Par ce détail se révélait dans leurs caractères un égal mépris du gracieux, au bénéfice de qualités moins brillantes peut-être, autrement solides et durables.

Les peignoirs des enfants formaient un tas clair, Marie-Thérèse eut une révolte en entrant dans l’eau et jeta sur sa mère, qui la surveillait, un regard tout empreint d’une poignante détresse. Mais, sans doute, la menace qui pesait sur elle lui