Page:Henri Deberly Le Supplice de Phèdre 1926.djvu/188

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
186
LE SUPPLICE DE PHÈDRE

mettre un terme à sa solitude ne s’était offerte à cette femme. Sourdement, elle songeait à s’en inquiéter. Elle qui jamais n’avait senti les atteintes de l’âge, demeurée aussi souple à quarante-six ans qu’elle avait pu l’être à vingt-cinq, n’affrontait plus sans le malaise de l’appréhension l’épreuve quotidienne du miroir. Pour la juger satisfaisante ou même honorable, il lui fallait s’armer parfois d’une grande indulgence. Certains jours, elle cédait au découragement. L’imagine-t-on voyant finir une crise aussi longue sur les aveux les plus timides, l’hommage le plus frais, l’admiration la plus ouverte et la moins hardie qu’elle eût reçue d’un soupirant dans toute sa carrière ? Mesure-t-on la chaleur de la complaisance qu’avait pu mettre, en renaissant, au service de Marc, cette amoureuse prête à verser dans le désespoir ? Si sa nature et la pratique ordinaire du vice avaient fait d’elle une magicienne en matière galante, son enthousiasme à raffiner sur la perfection la rendait supérieure à tout son passé. Il la dévorait, la brûlait. Il la portait à s’épanouir dans l’oubli d’elle-même. Il inspirait à sa passion, lorsqu’elle s’épanchait, certains artifices de génie.

Marc avait eu la sensation d’un éblouissement. Une enfance pure, peu d’émotions dans l’adolescence et, jusqu’à l’heure de cette rencontre, aucune inquiétude, n’est-ce pas tout dire des mille secousses qui peuvent rompre une âme endurant l’assaut d’une telle fièvre ? Les moyens de celle-ci le désemparaient. Rien, au surplus, dans ses