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Page:Henri Deberly Le Supplice de Phèdre 1926.djvu/208

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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

La domestique qui vint ouvrir parut hésiter.

— Faites passer, lui dit-elle, cette carte à Madame !

On l’introduisit au salon. C’était une chambre assez spacieuse et parfaitement claire, plutôt meublée avec le goût qu’une femme de vingt ans peut répandre aujourd’hui dans un intérieur qu’avec celui d’une personne mûre, bourgeoisement mariée et déjà enrichie par des héritages. Trop de tentures, trop de coussins, sur des sièges trop bas, de guéridons, de chinoiseries et de lampes énormes y compensaient la pénurie de pièces d’un bon style. Le souci de la mode s’y accusait trop. Une poupée dormait dans un coin. L’idée que Marc, à son insu, depuis plusieurs mois, venait ici régulièrement, et qu’il s’y plaisait, qu’il y respirait comme chez lui, qu’entre ce cadre et sa personne existait un lien, agit d’abord de telle façon sur les nerfs d’Hélène qu’elle sentit les pleurs la gagner. Pour les combattre, elle fit appel à toute sa raison. Cette première émotion un peu dissipée, comme elle regardait autour d’elle, une diversion lui fut donnée par des poissons roses dont elle suivit quelques instants les évolutions à travers la paroi d’une jatte de cristal. Pareil objet, dans un salon, lui sembla grotesque. Elle sourit de pitié et se trouva mieux.

Mais Mme Aliscan ne paraissait pas. Dans l’appartement, aucun bruit. « Ou elle a peur, » se dit Hélène qui s’impatientait, « ou bien elle est à sa toilette, devant ses crayons et elle se refait une