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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

quelle raison aurait eue Marc d’y glisser une balle au retour d’une absence de vingt-cinq minutes ? Là s’étaient limitées toutes ses réflexions. Les services qu’aussitôt elle avait dû rendre l’avaient empêchée d’en faire d’autres.

À présent, dévorée d’un cruel chagrin, elle recherchait à cette folie une cause vraisemblable. Les deux bras allongés sur la couverture, dans le jour faible et reposant, mais comme sablé d’or, que laissaient pénétrer les persiennes fermées, son beau-fils dormait sous ses yeux. Hélène, assise dans un fauteuil, se mordant un doigt, contemplait avidement cette figure chérie, comme dans l’attente d’y voir s’inscrire le mobile secret qui l’avait armée contre elle-même. Subterfuge dont elle jouait envers sa conscience ! Ce mobile, à tout prendre, elle le soupçonnait, mais ne voulait pas se l’avouer. Ou, pour mieux dire, elle refusait de considérer un mobile qui, d’abord, semblait évident bien qu’en fait inexact et d’invention pure. Brusquement, elle sentit sa défense se rompre et les circonstances l’accablèrent. Jamais son âme n’avait subi une pareille secousse. L’hésitation, même complaisante, même de mauvaise foi, n’était plus ni permise, ni seulement possible. Tout se liait, s’enchaînait et s’expliquait trop.

Quelle horreur profonde elle prit d’elle ! Ah ! ce pli de la bouche qu’elle garda longtemps et ces regards noirs d’épouvante, ce tragique silence dont elle couvrit Marc endormi ! Près d’une armoire, une petite glace suspendue au mur lui renvoyait confusément l’image de ses traits qui, soudain, lui