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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

à m’assurer qu’elles sont vraiment sues, tu viendras tous les soirs me les réciter.

— Vous les réciter ? grogna Marc. Mais, petite mère, les professeurs n’en exigent pas tant ! C’était bon pour la boîte, les récitations !

— Ce sera bon aussi longtemps qu’il me conviendra ! prononça Hélène d’un ton sec. Au surplus, fais-moi grâce de tes commentaires !

— Cependant… reprit-il, comme perdant patience.

Elle le regarda.

— Tu résistes ?

Il hésita quelques instants, tenté de dire oui, puis sortit, la tête basse, et gagna sa chambre.

Les habitudes de la jeune femme se renouèrent d’elles-mêmes. Pendant plus de dix ans, presque à toute heure, elle avait surveillé le travail de Marc, soigneusement réglé sa conduite. Elle l’avait assoupli, remanié, formé. Il lui parut tout naturel qu’après une relâche, aussi courte, en somme, qu’insensible, sa vigilance recommençât, puisqu’il le fallait, à se déployer largement. Marc, à ses yeux accoutumés, ne changeait qu’à peine, grandissait et pourtant ne vieillissait pas. L’ayant toujours tenu près d’elle dans une dépendance qu’elle avait su rendre absolue, que régissait assurément une tendresse profonde, mais qui n’était parfois ni douce, ni surtout paisible, et qu’il acceptait sans un mot, elle n’avait vu ni les symptômes de l’adolescence naître en lui peu à peu et s’y développer, ni, par là même, se dessiner entre leurs personnes un obstacle encore transparent. Pour se résoudre à le laisser quelques