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LETTRES MISSIVES


pour parvenir à leurs fins. C’est pourquoy leur amitié et 'accointance est plus dangereuse que leurs armes. lls ne font difficulté ny cons- cience de siaccorder avec tous et d’entrer en leur alliance et amitié, et de plus promettre et donner que souvent l’on ne desire d’eux, jus- qu’à ce qu'ils ayent gagné assez de creance et de pouvoir pour dresser leurs pratiques et les conduire à bon port, ayant si peu de honte d’estre soupçonnez et descouverts en cas semblables, que quand ils sont mesmes surpris sur le faict, ils sont plus deplaisans d’avoir failly leur entreprise qu’ils ne le sont de leur conviction. C’est chose estrange, que j’ay experimentée ; et tant s’en fault qu’ils changent de propos et quittent telles facons de faire, que quand l’on use de douceur et d’humanité envers eux, pour le respect de leur roy ou pour quelqtfautre consideration, ils en deviennent seulement plus har- dis, et s’estudient à mieux deguiser et redresser, aprés, leurs mesmes desseins ; desquels s’il advient que l’on se plaigne à leur roy et à ses_ prin- cipaux ministres, ils nous payent d’un desadveu et d’une negative en- tiere, sans qu’il s’en ensuive, e ne diray une seule punition, mais une seule reprehension et correction convenable. Auroient-ils refusé au dict roy mon bon frere Owen et Baldouin, ses subjects convaincus de ceste, detestable conspiration, s’ils estoient aussy sinceres en leurs amitiez qu’ils sont artificieux pour le faire croire? Quand je lis la paix avec eux, me defliant ja de leur foy pour moy, esprouvée auparavant, je pris resolution d’entretenir avec les Estats des Provinces-Unies des Pays- Bas fintelligence à laquelle la condition et necessité de leurs affaires i nous avoient auparavant engagez ; pour, si le roy d’Espagne manquoit à sa foy et promesse, me prevaloir d’icelle ; en quoy je recognus, devant que l’année de nostre traicté fust passée, que j’avois pris bon conseil. Car, comme malicieusement ils nlavoient voulu decider la question du marquisat de Saluces, en me faisant raison, par le dict traicté, de fusurpation manifeste que le duc de Savoye en avoit faicte sur le feu Roy, auquel le pere du dict duc, et luy, avoient une tres grande et speciale obligation, comme vous sçavés, ils ne me don- nerent que trop d'occasions de croire qulils avoient expressement re-