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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

quarts d’heure encore, il est à la barrière du Trône. Il n’a donné que trente centimes, mais il a mis près de trois heures à parcourir en voiture la route qu’il eût faite à pied en moins de deux heures.

Quel bonheur n’a pas ses tourments ? Quelle invention n’a pas ses défauts ?

Voilà ce que c’est que la correspondance.

Les voyageurs de l’impériale sont privés de ces avantages.

En revanche, ils jouissent d’une faculté inconnue à leurs confrères de l’intérieur, celle de se briser le cou ou quelque membre important en escaladant les marches de leur étage. Le plus souvent, quand ils se livrent à l’ascension ou à la descente, la voiture va grand train ; il serait ridicule de forcer le cocher à s’arrêter ; on est homme ou on ne l’est pas. Les accidents sont fréquents, c’est vrai, mais l’honneur est sauf.

Il y a des gens qui montent sur l’impériale par tous les temps ; à la vérité, on y est abominablement mouillé quand il pleut, et l’on n’a pas la ressource de se réfugier sous une porte cochère.

Si vous avez un parapluie, le droit de l’ouvrir vous est impitoyablement dénié par vos voisins, qui se plaignent amèrement que vous vous privez de votre part d’eau céleste en faveur de leurs épaules ; la position n’est pas tenable, mais elle est occupée. Le Français est si heureux de se faire rouler qu’il n’est pas rare, en toute saison, de voir se bousculer deux ou trois individus entre les bras d’un conducteur inno-