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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

Car l’amour des pendants et de l’uniformité nous tient étrangement. C’est un piètre amour, on en conviendra ; amour bourgeois, amour étroit, indigne d’une grande nation. Amour général cependant ; et plus d’un qui en rit est plus affecté qu’il ne pense. Je n’en veux d’autre preuve que la garniture de nos cheminées ; n’est-elle pas d’une monotonie aussi remarquable que son incommodité ? Et cependant personne ne songe à la changer. Pourquoi ? À cause des pendants.

Toujours, au centre précis, s’élève la pendule, fière, dominatrice du sanctuaire, étendant orgueilleusement devant la glace, qui dès lors devient inutile, ou ses anges joufflus, ou sa bergère des Alpes, ou sa déesse nue. Puis ce sont les vases, un de ci, un de là, comme des soldats à la revue ; puis les candélabres ; puis, si quelque objet est suspendu à droite, à gauche, on n’oublie pas d’en suspendre un semblable. C’est un autel tout préparé, où le prêtre n’a plus qu’à venir pour dire la messe à la pendule.

Je me souviens qu’étant enfant, ce fut un de mes jeux favoris. Lorsqu’on me laissait seul, je parodiais innocemment les fonctions du curé de ma paroisse, et j’allais immolant et avalant une hostie, à la plus grande gloire d’un tableau placé au-dessus de la glace, et qu’avait peint mon père.

Ce rapprochement puéril est en effet le premier qui se présente à l’esprit ; aussi prouve-t-il le ridicule de notre ameublement. Ce goût domine aujourd’hui l’architecte et le prince, et toutes les fois qu’une maison s’élève à l’opposite, immédiatement s’en fonde une identique.

Exemple :

Il y avait sur un flanc du jardin une hideuse serre, une de ces constructions mort-nées, qu’on élève pour l’utilité, mais que le goût condamne à périr. On mit néanmoins assez