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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

qui sera. À droite ce qui est, le mouvement, l’heure présente, le travail, le commerce, la finance. Tout 1861 est ici. L’ouvrier poursuit son labeur quotidien dans le faubourg Saint-Antoine ; Saint-Denis et Saint-Martin vendent tous les produits de la terre ; Saint-Honoré exploite l’univers, et donne l’essor à la richesse moderne, à la grande industrie, à la domination pompeuse. De ci, de là, courtisanes et lorettes saupoudrent la Chaussée-d’Antin, assaisonnement obligé de ses festins luxueux. En deux paragraphes, voilà donc Paris, qu’en pourrais-tu dire de plus ?

« Imite-moi.

« Je souris à ces antiques hôtels, où s’enferment des regrets sans espoir.

« Je souris à ces écoles, où la jeunesse espère sans rien regretter,

« Je souris même à la mendicité, comme Callot à ses bohémiens.

« Mais je ris, oh ! je ris à gorge déployée de ce qui se passe sur la rive droite.

« Qu’y a-t-il de plus comique qu’un quiproquo ? Certes, toi et moi, nous ririons bien, si, regardant dans la lune, nous voyions un million d’êtres innomés courir çà et là à la poursuite d’un brouillard insaisissable, dans lequel ils croiraient voir une masse solide. N’as-tu pas ri quelquefois, un jour de fête publique, sur cette place des Invalides, alors qu’un monsieur, du haut de son balcon, jetait sur la foule des cornets de dragées, et qu’une multitude immense combattait pour en attraper une ? Le plus souvent celui qui n’y pense pas reçoit le cornet sur la tête, et gagne le prix. Les autres, après mille efforts, se retirent tout meurtris, et n’ayant dans la main qu’une part de bonbon souillée de fange. N’as-tu pas ri encore, en voyant durant tout un jour d’été une douzaine