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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

quais ordinairement déserts ! comme la joie brille dans tous les regards ! comme tous ces passants sont heureux !

Partout des flots de lumière ; la Seine est chargée de barques fantastiques ; le canon tonne aux Invalides, et le ciel, jaloux de la terre, arbore ses millions d’étoiles, dont l’éclat nous promet une nuit délicieuse.

— Allons jusqu’au feu d’artifice, lui dis-je.

Elle répondit oui, et se serra contre mon bras.

Jusqu’à la place il était possible de se mouvoir ; mais les abords de celle-ci me semblèrent tellement impraticables que je lui proposai de revenir. L’enfant ne voulut pas ; l’allégresse qui régnait dans l’air avait pénétré jusqu’à son âme ; elle se sentait mieux ; elle sautait dans la foule comme une biche emportée.

D’ailleurs il ne fut bientôt plus temps de réfléchir, des masses aussi compactes que les premières s’étaient formées derrière nous. Si avancer était difficile, reculer devenait impossible,

Les premières fusées éclatèrent en l’air, le feu d’artifice se tirait sur l’eau.

Dans une foule, quelque épaisse qu’elle soit, il y a, comme dans la mer, des mouvements fiévreux qui l’agitent et forment ses vagues ; chacun est entraîné par ces mouvements. Après quelques minutes, elle et moi nous avions été portés au milieu de la place.

Vint un reflux qui nous renvoya vers la rue de Rivoli. Là plus de peuple encore que partout ailleurs, un peuple plus nombreux, plus serré, plus compacte.

Il y avait réception au Ministère de la marine ; on gardait les abords de l’hôtel, et par conséquent la rue Saint-Florentin ; quatre carabiniers, fièrement campés sur leurs chevaux, retenaient l’impétueux élan du public qui frémissait d’im-