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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

d’une vie, d’un mouvement et d’une agitation nobles et fiers comme le frémissement des ailes d’un aigle.

La rue Royale est le plus beau fleuron qui luise à cette couronne de rues. Elle a la largeur d’une place, ses trottoirs rivalisent avec ceux des boulevards et, comme ces derniers, elle possède des arbres et des marchandes de journaux.

Les arbres et les marchandes de journaux sont les signes caractéristiques de toute grande voie publique.

Les honnêtes Français, qui n’ont jamais franchi les barrières de leur capitale, s’expliqueraient malaisément ce que nous autres Parisiens nous appelons des arbres.

Ce sont de petits morceaux de bois maigres, semblables aux échalas qui soutiennent les ceps de vigne, d’une hauteur qui atteint à peine l’entresol des plus basses maisons ; de temps immémorial, on n’avait vu de feuilles croître à l’extrémité de ces petits bâtons, lorsque l’administration municipale, dans sa sollicitude pour les citoyens qui l’enrichissent, s’avisa d’offrir un air pur aux bons habitants de sa bonne ville ; un air pur, c’est impossible, direz-vous. Sachez que rien n’est impossible à l’administration municipale.

Elle avait entendu dire, cette excellente administration, quoique sans y comprendre grand’chose, elle avait entendu dire par quelque professeur de physique que deux gaz composaient l’air, l’oxygène et l’azote ; l’azote qui donne la mort, l’oxygène dont on fait la vie. Or, c’est toujours le physicien qui parle à l’administration, l’azote est aspiré par les plantes, qui, par conséquent, rejettent l’oxygène, ce dernier seul étant susceptible d’être respiré par l’homme, et l’azote étant funeste à notre nature, il s’ensuit que plus il y aura d’oxygène