Page:Henri Poincaré - Dernières pensées, 1920.djvu/112

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de l'ordre. Ces axiomes nous apparaissent ainsi comme la définition du mot entre.

On peut alors se servir de ces axiomes, à la condition d'avoir démontré qu'ils ne sont pas contradictoires, et on pourra construire sur eux une géométrie où l'on n'aura pas besoin de figures et qui pourrait être comprise d'un homme qui n'aurait ni vue, ni toucher, ni sens musculaire, ni aucun sens, et qui serait réduit à un pur entendement.

Oui, cet homme comprendrait peut-être, en ce sens qu'il verrait bien que les propositions se déduisent logiquement les unes des autres ; mais l'assemblage de ces propositions lui paraîtrait artificiel et baroque et il ne verrait pas pourquoi on l'aurait préféré à une foule d'autres assemblages possibles.

Si nous n'éprouvons pas les mêmes étonnements, c'est que les axiomes ne sont pas, en réalité, pour nous de simples définitions, des conventions arbitraires, mais bien des conventions justifiées. Pour les axiomes des autres groupes, je tiens qu'elles sont justifiées parce que ce sont celles qui s'accordent le mieux avec certains faits expérimentaux qui nous sont familiers et qu'elles nous sont, par là, les plus commodes ; pour les axiomes de l'ordre, il me semble qu'il y a quelque chose de plus, que ce sont de véritables propositions intui-