Page:Henri Poincaré - Dernières pensées, 1920.djvu/67

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On voit donc quel est le sens du principe de relativité physique ; il n’est plus une simple convention ; il est vérifiable et par conséquent il pourrait n’être pas vérifié ; c’est une vérité expérimentale, et quel est le sens de cette vérité ? Il est aisé de le déduire des considérations qui précèdent ; il signifie que l’action mutuelle de deux corps tend vers zéro quand ces deux corps s’éloignent indéfiniment l’un de l’autre ; il signifie que deux mondes éloignés se comportent comme s’ils étaient indépendants ; et on conçoit mieux pourquoi le principe de relativité physique a moins d’extension que le principe de relativité psychologique ; ce n’est plus une nécessité due à la nature même de notre esprit ; c’est une vérité expérimentale à laquelle l’expérience impose des limites.

Ce principe de relativité physique peut servir à définir l’espace ; il nous fournit pour ainsi dire un nouvel instrument de mesure. Je m’explique : comment le corps solide pouvait-il nous servir à mesurer, ou plutôt à construire l’espace ? En transportant un corps solide d’une position dans une autre, nous reconnaissions qu’on peut l’appliquer d’abord sur une figure et ensuite sur une autre et nous convenions de considérer ces deux figures comme égales. De cette convention naissait la géométrie. À chaque déplacement possible du corps solide correspondait ainsi une transformation de l’espace