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ainsi en s’interdisant un nombre fini d’éléments aura une dimension ; un continu physique aura dimensions, si on peut le découper en y pratiquant des coupures qui soient elles-mêmes des continus physiques à dimensions.


§ 3. — L’ESPACE ET LES SENS

La question semble résolue ; nous n’avons, semble-t-il, qu’à appliquer cette règle, soit au continu physique qui est l’image grossière de l’espace, soit au continu mathématique correspondant qui en est l’image épurée et qui est l’espace du géomètre. C’est là une illusion ; cela irait bien si le continu physique d’où nous tirons l’espace nous était directement donné par les sens, mais il est loin d’en être ainsi.

Voyons, en effet, comment on peut, de la masse de nos sensations, déduire un continu physique. Chaque élément d’un continu physique est un ensemble de sensations ; et le plus simple est de considérer d’abord un ensemble de sensations simultanées, un état de conscience. Mais chacun de nos états de conscience est quelque chose d’excessivement complexe, si bien qu’on ne peut espérer voir jamais deux états de conscience devenir indiscernables et cependant pour construire un continu physique, il est essentiel, d’après ce qui précède,