Page:Henri Poincaré - Savants et écrivains, 1910.djvu/162

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Il peut sembler superflu de rien ajouter ; qu’on me permette cependant de me placer à un autre point de vue et d’expliquer pourquoi ce genre de recherches, quand même il devrait être inutile, ne serait pas pour cela sans intérêt.

Le savant digne de ce nom, le géomètre surtout, éprouve en face de son œuvre la même impression que l’artiste ; sa jouissance est aussi grande et de même nature. Si je n’écrivais pas pour un public amoureux de la Science, je n’oserais pas m’exprimer ainsi; je redouterais l’incrédulité des profanes. Mais ici je puis dire toute ma pensée. Si nous travaillons, c’est moins pour obtenir ces résultats positifs, auxquels le vulgaire nous croit uniquement attachés, que pour ressentir cette émotion esthétique et la communiquer à ceux qui sont capables de l’éprouver.

Cette émotion, les œuvres inspirées par les deux tendances opposées peuvent également nous la procurer. Si nous aimons à gravir les cimes d’où nous découvrons de larges horizons, notre admiration est-elle moindre devant les ouvrages accomplis de la statuaire