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SULLY PRUDHOMME

Il songe au silence alarmant
De l’univers inexplicable.
Le front lourd, le cœur dépouillé,
Plus triste d’un savoir plus ample,
Sur les marches du dernier temple
Il pleure encore agenouillé.


Comme l’a dit Pascal, chercher Dieu, c’est déjà l’avoir trouvé. Aussi quand la mère de Sully, tout inquiète, demandait à Gaston Paris : « Dites-moi, oh ! affirmez-moi que dans son livre il n’y a rien contre Dieu », il pouvait à bon droit lui répondre : « Madame, je vous jure qu’il n’y a pas un mot, pas une pensée qui soit impie, et que cette poésie entière, loin de se détourner de Dieu, le cherche constamment par le plus sincère et le plus religieux des efforts. »

Pascal est pour nous un problème, et il est peu de penseurs que ce problème n’ait préoccupés ; il eût été surprenant qu’il n’attirât pas le poète philosophe qui avait connu les mêmes déchirements. Dès 1862, Sully écrivait dans son journal intime :

« Pascal, je t’admire, tu es mien, je te pénètre comme si je pensais en toi, tristesse