Page:Henry - Les Littératures de l’Inde.djvu/36

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dégoûtera à tout jamais de la phraséologie védique. Mais, partout ailleurs, — et le lecteur a déjà pu s’en convaincre, — ils seront bien payés de leur constance ; car ils liront rarement dix à vingt stances sans rencontrer une perle isolée ou même, çà et là, tout un riche écrin.

La chronologie est le fonds qui manque le plus à l’histoire littéraire comme à l’histoire politique de l’Inde : dans ses deux premiers millénaires, elle n’offre guère d’œuvre qu’on puisse dater autrement qu’à une approximation de cinq à six siècles ; à plus forte raison lorsqu’il s’agit de remonter aux origines. Le Rig-Véda est à coup sur le plus ancien des quatre ; mais quel âge a-t il ? Passons sur l’antiquité fabuleuse que lui assignent les croyances locales : la mystique hindoue jongle avec les siècles comme le pourrait faire l’Éternel en personne. Passons aussi sur celle qui ressortirait de calculs astronomiques, ingénieux et précis, à la vérité, mais qui ont le tort de ne point s’appliquer aux écrits eux-mêmes, de ne viser que telles ou telles traditions qui s’y sont survécu : il est clair que ces traditions peuvent être beaucoup plus anciennes que les documents qui s’y rapportent. Mais n’évitons pas moins l’excès de scepticisme qui ferait descendre les Védas jusqu’au temps d’Alexandre le Grand, sous le prétexte que l’Inde n’aurait pas eu d’écriture avant cette époque : l’assertion est toute gratuite, et, se vérifiât-elle, elle ne prouverait rien