Non pas qu’il nie l’existence d’un Dieu. À quoi bon ? il n’en a point affaire. Le Véda seul est autorité, non seulement en tant que révélation spirituelle, mais en tant que parole audible, incréée, immanente, de toute éternité : dès lors, il se peut qu’il y ait un Dieu, mais cela est indifférent ; ou plutôt, si on le préfère, c’est le Véda qui est Dieu, c’est le Véda qui est Tout.
« C’est Brahma qui est Tout », a poursuivi, poussant la pensée à ses ultimes conséquences, l’école de Vyâsa. Ce saint personnage est le compilateur mythique des Védas, dont la « dernière partie », l’Upanisad (p. 39), a servi de base à la « seconde méditation », plus communément nommée le Védânta, « la fin du Véda ». Matériellement, les deux formules ne diffèrent guère, puisque brahman, on l’a vu, signifie « formule magique, prière, service divin, sainteté, principe saint et éternel », et que l’essence de tout cela, c’est le Véda ; mais, tandis que le mimansiste chemine à mi-côte en suivant la lisière de ses textes, c’est d’un vol effréné que le védantiste — s’élance à l’empyrée ou plonge aux abîmes d’un nihilisme panthéiste aussi radical que jamais aucune conscience humaine en ait imaginé.
Il n’y a rien. Tout est Brahma : Brahma neutre, insexué, océan dont les êtres, dans leur diversité infinie, ne sont que les vagues, les écumes et les bulles ; ou Brahma masculin, incarnation mystique du Puruṣa védique, de l’Âme suprême, dans sa