Page:Henry George - Progrès et Pauvreté.djvu/356

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développement. Le plus fort et le plus adroit acquiert facilement une part supérieure dans cette espèce de propriété, qu’on peut avoir, non en produisant, mais par appropriation, et en devenant seigneur de la terre, on devient nécessairement seigneur de ses semblables. La possession de la terre est la base de l’aristocratie. Ce n’était pas la noblesse qui donnait la terre, c’était la terre qui donnait la noblesse. Tous les immenses privilèges de la noblesse de l’Europe du moyen âge venaient de sa position comme maîtresse du sol. Le simple principe de la propriété du sol produisit d’un côté le seigneur, de l’autre le vassal, l’un ayant tous les droits, l’autre n’en ayant aucun. Le droit du seigneur a la possession du sol une fois reconnu et conservé, ceux qui vivaient sur ces terres ne pouvaient le faire que suivant les conditions dictées par lui. Les mœurs et les habitudes firent que ces conditions comprenaient des services et servitudes aussi bien que des rentes en nature ou en argent ; mais la chose essentielle qui forçait d’accepter ces conditions, c’était la possession de la terre. Ce pouvoir existe partout existe la propriété de la terre et se dégage partout où la compétition pour l’usage de la terre est assez grande pour permettre au landlord de dicter lui-même ses conditions. Le propriétaire anglais d’aujourd’hui a, par la loi qui reconnaît son droit exclusif à la terre, essentiellement la même puissance qu’avait son prédécesseur, le baron féodal. Il peut exiger la rente en services ou servitudes. Il peut forcer ses tenanciers à s’habiller d’une certaine façon, à professer une certaine religion, à envoyer leurs enfants à une école particulière, à soumettre leurs différents à sa décision, à tomber à genoux quand il leur parle, à le suivre vêtus de sa livrée, à lui livrer l’honneur de leurs femmes, s’ils ne veulent pas quitter sa terre. Il peut, en résumé, demander tout ce qu’accepteront les hommes pour vivre sur sa terre, et la loi ne peut pas l’en empêcher à moins qu’elle ne tempère son droit de propriété, par égard pour ceux qui voudraient que ce droit prît la forme d’un libre contrat, ou d’un acte volontaire. Et