Page:Henry George - Progrès et Pauvreté.djvu/370

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mettre aux propriétaires de prendre la rente, ou compenser d’une manière quelconque la perte de cette rente ? Considérez ce qu’est la rente. Elle ne naît pas spontanément de la terre ; elle n’est due à aucune chose faite par le propriétaire. Elle représente une valeur créée par toute la communauté. Que les propriétaires aient, si vous voulez, tout ce que leur donnerait la possession de la terre en l’absence du reste de la communauté. Mais la rente, création de toute la communauté, appartient nécessairement à toute la communauté.

Soumettez le droit des propriétaires à l’épreuve des maximes de la loi commune qui déterminent les droits de l’homme vis à vis de l’homme. La loi commune, nous dit-on, est la perfection de la raison, et certainement les propriétaires ne peuvent se plaindre de sa décision car elle a été construite par et pour les propriétaires. Eh bien, que donne la loi au possesseur innocent quand la terre, pour laquelle il a donné son argent, est jugée appartenir légitimement à un autre ? Rien du tout. Qu’il ait acheté de bonne foi, cela ne lui donne aucun droit de réclamer. La loi ne s’occupe pas de la « question compliquée des compensations » pour l’acheteur innocent. La loi ne dit pas comme John Stuart Mill : « La terre appartient à A, donc B qui a pensé qu’il en était le possesseur n’a droit qu’à la rente, ou compensation pour sa valeur de marché. » Car ce serait vraiment comme cette décision fameuse à propos d’un esclave fugitif, et d’après laquelle on disait que la cour avait donné la loi au Nord et le nègre au Sud. La loi dit simplement : « La terre appartient à A, que le magistrat chargé de la faire exécuter mette A en possession de son bien ! » Elle ne donne aucun droit à l’acheteur innocent d’un titre illégitime, elle ne lui alloue aucune compensation. Et non seulement cela, mais elle lui prend toutes les améliorations qu’il a faites de bonne foi sur la terre. Vous pouvez avoir donné un prix élevé de la terre, avoir fait tous vos efforts pour vous assurer que le titre est bon ; vous pouvez l’avoir possédée sans contestation pendant des années, sans avoir pensé