Page:Heredia - Discours de réception, 1895.djvu/14

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Bon écolier, M. de Mazade le fut assurément, car du collège de Bazas, où il fit ses humanités, il n’avait gardé que d’agréables souvenirs. Ses études achevées, il prit à la Faculté de Toulouse ses premières inscriptions de droit. Son avenir semblait réglé d’avance, sa carrière tracée : il serait magistrat. Il n’en fut rien. Après avoir traduit les poètes anciens, le jeune étudiant lut les modernes. Dès lors, les Institutes lui paraissent insipides. Ses cahiers de notes se couvrent de lignes irrégulières, longues ou courtes. Il rime des odes ! L’esprit aventureux de son aïeul le Conventionnel l’emporte loin de sa province. Ce n’était plus le temps des rapides fortunes politiques ou militaires. Il rêva la gloire des lettres. Paris l’appelait, il l’a dit en vers lyriques. Il avait hâte de quitter Toulouse et Flamarens même. Quels durent être les regrets, les doutes, la tristesse inquiète de l’adieu pour une mère aussi tendre que l’était la sienne !

C’est en 1840 qu’il prit pied sur le dur pavé de Paris. Il avait vingt ans, des espérances fraîches et son volume d’odes. Il le publia dès l’année suivante. C’est un in-8o élégamment imprimé, selon la mode du temps. Sous le titre, en épigraphe, un seul mot : Perseverando. Cette brève et brave devise de son premier ouvrage convient à toute la longue vie littéraire de M. de Mazade. Nul n’a mieux persévéré. Le livre s’ouvre par une courte préface, dogmatique, ainsi qu’il sied à l’extrême jeunesse, et néanmoins fort judicieuse. « Il a cherché, dit-il, à s’éloigner de cette voie toute personnelle où on a entraîné la poésie ; cette façon familière de mettre son cœur à nu devant le public