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LES TROPHÉES


Il craint que ses amis ne lui demandent compte,
Et ne veut pas, navré d’un vertueux ennui,
Leur laisser respirer l’haleine de sa honte.

Alors il fit quérir et rangea devant lui
Les quatre rejetons de sa royale branche,
Sanche, Alfonse, Manrique et le plus jeune, Ruy.

Son cœur tremblant faisait trembler sa barbe blanche ;
Mais l’honneur roidissant ses vieux muscles glacés,
Il serra fortement les mains de l’aîné, Sanche.

Celui-ci, stupéfait, s’écria : — C’est assez !
Ah ! vous me faites mal ! — Et le second, Alfonse,
Lui dit : — Qu’ai-je donc fait, père ? Vous me blessez ! —

Puis Manrique : — Seigneur, votre griffe s’enfonce
Dans ma paume et me fait souffrir comme un damné !
— Mais il ne daigna pas leur faire une réponse.

Sombre, désespérant en son cœur consterné
D’enter sur un bras fort son antique courage,
Diego Laynez marcha vers Ruy, le dernier-né.