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ROMANCERO


Et Don Fernan debout sous les portes vermeilles,
Un instant, ébloui, s’arrêta sur le seuil
Aux acclamations qui flattaient ses oreilles.

Il s’avançait, charmé du glorieux accueil...
Tout à coup, repoussant peuple, massiers et garde,
Une femme apparut, pâle, en habits de deuil.

Ses yeux resplendissaient dans sa face hagarde,
Et, sous le voile épars de ses longs cheveux roux,
Sanglotante et pâmée, elle cria : — Regarde !

Reconnais-moi ! Seigneur, j’embrasse tes genoux.
Mon père est mort qui fut ton fidèle homme lige ;
Fais justice, Fernan, venge-le, venge-nous !

Je me plains hautement que le Roi me néglige
Et ne veux plus attendre, au gré du meurtrier,
La vengeance à laquelle un grand serment t’oblige.

Oui, certe, ô Roi, je suis lasse de larmoyer ;
La haine dans mon cœur bout et s’irrite et monte
Et me prend à la gorge et me force à crier :