Mais le Bienheureux répondit au Malin :
« Non, Mâra, non, je n’éteindrai pas encore la flamme, je n’entrerai pas encore dans le nirvâna. Il faut que je gagne à ma loi des disciples nombreux, qui, à leur tour, lui gagneront d’autres disciples. Il faut que, par des paroles et par des actes, je réduise au silence mes adversaires. Non, Mâra, je n’entrerai pas dans le nirvâna tant que le Bouddha ne sera pas célébré par le monde, tant que ne sera pas reconnu le bienfait de sa loi. »
Mâra dut s’en aller, tout confus. Il lui semblait entendre des voix divines, qui disaient, par raillerie :
« Tu es vaincu, Mâra, et tu restes rêveur, comme un vieux héron. Tu es sans force, Mâra, tel un vieil éléphant embourbé dans un marais. Tu te croyais un héros, et tu es plus faible qu’un malade abandonné dans une forêt. À quoi t’ont servi tes paroles insolentes ? Elles étaient plus vaines que des bavardages de corneilles. »
D’un morceau de bois mort, il traçait des figures sur le sable. Ses trois filles, Rati, Arati et Trishnâ l’aperçurent. Elles voulurent savoir la raison de son chagrin :
« Pourquoi es-tu si triste, père ? demanda Rati.
— Je suis vaincu par un homme pur, répondit Mâra. La force ni la ruse ne peuvent rien contre lui.