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Page:Hess - L’Âme nègre, 1898.djvu/11

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MAJOGBÉ.

humaine, tumultueuse floraison de bonnets et de pagnes multicolores. Des esclaves à la tête rasée, au torse nu, tapent, et leurs matraques ouvrent un passage aux maîtres, les hommes puissants, qui, parés des vêtements de fête, arrivent, impassibles, montés sur leurs chevaux d’apparat. Les bêtes se cabrent, ruent, écrasent des pieds, font craquer des poitrines. Les hommes puissants doivent être aux premiers rangs. Avec leur cortège de serviteurs, de guerriers, de chevaux caparaçonnés de cuirs et de soies, avec les pages qui portent leurs armes, les chefs s’installent autour des poteaux peints qui marquent la limite du domaine d’Oro. Ils sont là tous, les Oluos, les Akpenans, les Balougouns, les Asikpas, les Olukotans et les Issas. Ils ont leurs musiciens, leurs joueurs de flûte et les tambourinaires.

Puis viennent les Ogbonis avec les baguettes et les sacs de cuir aux broderies saintes. Puis le Basorum, l’homme du roi, son ekep, son second. Et enfin, grave, mystérieux, redoutable, au milieu d’un groupe de prêtres qui sifflent, le grand pontife d’Oro, l’Ologbo Oro, le « chat » qui mange les hommes.

En ce moment les femmes tremblent, terrées à l’abri des murs des cases. Et dans le peuple des mâles plus d’un frémit, se demandant sur quelles victimes le terrible pontife va lancer la colère du dieu.