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MAJOGBÉ.

pas en maître, je viens en suppliant. Avant de faire chez moi le sacrifice des ancêtres, j’apporte aux dieux les offrandes qui leur sont dues. Que les esprits, les diables et Olodumare veuillent bien accepter mes présents. Je suis un homme pauvre, mais j’ai de la bonne volonté. Je fais ce que je peux.

Les vieilles prêtresses hurlèrent :

— Tu n’es pas un homme pauvre. Tu es un homme riche. Si tu te montres avare d’offrandes pour les dieux, ils se montreront à leur tour avares de biens pour toi.

Alors seulement Elado put se relever et offrir ses présents sur la pierre sacrée. Les féticheurs égorgèrent les victimes en criant et jetèrent le sang, le poil, la plume aux quatre vents. Ils prirent ensuite une partie de la chair, les têtes et les tripailles ; ils rendirent le reste aux femmes et aux esclaves qui devaient aller préparer le festin dans la maison d’Elado.

Les prêtresses et les prêtres étaient barbouillés de sang, des flaques rouges avaient coulé sur le rocher, et des dépouilles fumantes, sous le soleil chaud, une odeur montait, qui était agréable aux dieux et grisait les hommes. Tous chantaient, criaient, gesticulaient, trépignaient, religieux, heureux… Seul, Elado restait calme dans le retour qui semblait une marche d’hommes fous. Les esprits de l’Oluman étaient dans la foule, et cela faisait,