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MAJOGBÉ.

violes, des sons très forts, ainsi qu’il convient pour faire honneur à un grand chef. On les entendait de tous les côtés de la ville, et le peuple accourait pour voir et pour saluer. Trente vierges, toutes vêtues de même, avec des turbans bleus, des pagnes blancs et des écharpes noires, agitaient des palmes et chantaient. Les femmes, avec les enfants serrés dans l’écharpe sur le dos, tenaient des calebasses pleines de nourriture pour les génies qui protègent la cité et la race. Vingt enfants portaient des poules grasses ; vingt esclaves, des chèvres ; vingt autres, de jeunes béliers. Il y avait aussi un bœuf du pays des Gambaris. On l’avait orné de feuillages ; la grosse bête entravée marchait difficilement, effrayée par le bruit.

Ensuite venaient les guerriers, armés comme pour une expédition. Ils montaient des chevaux couverts de riches caparaçons. Derrière le cortège, Majogbé marchait avec Adamou.

Lorsque Elado parvint aux grottes où sont les fétiches vénérés de la nation — que les profanes ne peuvent voir sans mourir, — il trouva une foule de prêtres et aussi des Ogbonis. Il fut insulté ; on lui demanda pourquoi il venait troubler le repos des génies. « Quelle folie agitait son esprit pour lui donner l’audace d’amener en ce lieu toute sa maison ; il était sacrilège… »

Il se prosterna, très humble.

— Je ne viens pas en curieux, dit-il, je ne viens