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MAJOGBÉ.

Le jour suivant, ce furent les danses et les jongleries. Cent cinquante éguns obéissaient à Elado. Ils vinrent avec leurs masques de bois peint, leurs costumes resplendissants, leurs grelots, leurs sonnettes, leurs esclaves et leurs musiciens. Ils dansèrent, d’abord chacun en particulier, puis tous ensemble, les mythes nationaux et la religion des morts. Ils étaient eux-mêmes les esprits des morts. Le spectacle, durant toute la matinée, fut saisissant de grandeur et de foi. Après chaque danse, l’égun, majestueux comme l’est un personnage surnaturel, venait devant la galerie où Elado, vêtu de pagnes de soie, se tenait entouré de chefs. Elado se prosternait devant l’égun, l’adorait, lui donnait un sac de cauris et une bouteille de gin.

Des vieux calculaient qu’il dépensait ainsi une fortune dans la moitié d’un jour.

Après les éguns, on vit des jongleurs tacpas. Depuis plusieurs lunes, Elado avait demandé à Fuluani de lui faire venir de son pays des hommes capables d’illustrer une fête. Fuluani avait tenu parole. Ses messagers avaient ramené une troupe de baladins excessivement brillante. Les gens d’Aké les regardaient avec admiration, avec stupeur. Leurs éguns les plus célèbres n’avaient pas autant de science. Ils savaient bien danser, se rouler dans