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à Saint-Pierre, mais personne ne pouvait prévoir le danger qui menaçait.

Voudrais-je vous raconter tout ce qui s’est passé que je ne le pourrais. J’ai assisté à des scènes héroïques, car, il faut le constater, toute la population martiniquaise a fait admirablement son devoir. Ainsi, le maire du Prêcheur, le brave M. Grelet, un homme de couleur, a donné l’exemple de l’abnégation, en restant parmi ses administrés pendant tout le temps du danger ; il a été le dernier à se sauver. Le premier jour, quand je me suis rendu au Prêcheur pour porter des secours, personne ne voulait de secours ; ce que l’on voulait, c’était fuir devant le péril, car les flammes environnaient tout.

Quand je suis venu du Suchet, j’ai déclaré que je ne pouvais emmener avec moi que 250 personnes à peu près ; demain, dis-je, je viendrai pour vous sauver tous, et alors, j’ai fait passer à bord du Suchet, par des piroguiers d’une habileté remarquable et d’un désintéressement qui n’a pas son pareil dans l’histoire, j’en suis sûr, toutes les femmes, tous les enfants en bas âge ; les autres sont restés, se demandant si le lendemain nous les retrouverions encore. Dieu a voulu que nous les retrouvions, heureusement, car ces braves gens allaient périr de la mort la plus épouvantable.


Or, voici ce que j’ai lu sur les gens du Prêcheur, dans le journal Les Colonies du 7 mai :


« L’état d’esprit de la malheureuse population du Prêcheur est déplorable. Son moral est très affaissé, elle maire, M. Grelet, malgré tous ses efforts, ne parvient pas à le relever.

« Hier, sur l’ordre du gouverneur, un nouveau convoi de vivres a été apporté au Prêcheur par les soins de M. Pignier, agent du service local à Saint-Pierre (6.000 kilogrammes viande salée, haricots, morue).

« Les représentants de l’administration ont rencontré, pour