Page:Hetzel - Verne - Magasin d’Éducation et de Récréation, 1903, tomes 17 et 18.djvu/666

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« Je pars tout de suite, s’écria-t-il ; la voiture m’attend ; je suis monté pour vous embrasser et vous exprimer combien j’ai été heureux près de vous. »

M. Grimshaw serra la main de l’enfant et lui dit doucement :

« Je suis content de ce dernier adieu ; c’est toi qui m’as donné le premier baiser que j’aie reçu depuis mon enfance. »

Et Jock vit, à sa grande surprise, les yeux du vieillard se remplir de larmes. En route, il se félicita plus d’une fois d’avoir vaincu sa timidité, et d’avoir fait ce plaisir à son vieil oncle.

Après une absence, on éprouve ordinairement un sentiment de joie à retourner chez soi. Jock ressentit cette impression au seuil de la ferme où sa mère et Doris lui firent le plus tendre accueil.

Au premier moment, il se trouva heureux, écouta avec délices les exclamations de sa petite sœur devant les présents qu’il lui apportait ; mais son enthousiasme diminua en voyant son cher Tramp relégué sous le hangar : le pauvre animal avait perdu l’habitude d’être ainsi traité.

Mme Pole demanda à Jock comment il avait agi envers son oncle ; les réponses de l’enfant ne parurent pas satisfaire la mère.

« J’espère au moins, dit-elle, que tu n’as commis aucun dégât dans sa maison. Je ne suis pas surprise que ton oncle n’ait témoigné aucun désir de te garder plus longtemps, ou de te faire revenir aux vacances prochaines. Je n’ai qu’un regret, c’est de t’avoir laissé partir. »

Au lieu de se défendre, l’enfant resta muet, quelque injustes que lui parussent ces remontrances. Il ne savait pas encore qu’une loyale explication vaut mieux quand on est innocent ; il s’en tint à un air boudeur qui ne pouvait sembler que l’indice d’un mauvais caractère.

Mme Pole eut vite oublié son mécontentement ; elle ne parla plus qu’aimablement à son fils. Les impressions de Jock étaient plus tenaces, aussi ne donna-t-il qu’avec répugnance des détails sur son séjour à Gray-Tors. Doris ne pensait qu’à sa nouvelle poupée ; aussi le petit garçon put se concentrer en lui-même et vivre de ses souvenirs.

Le lendemain, Jock retourna en classe. Le travail l’intéressait ; il essayait par ses efforts de dépasser les autres élèves de son âge ; mais l’école, il la détestait. Ses camarades étaient d’une éducation inférieure ; l’année qu’il avait passée avec des enfants d’une autre situation lui rendait son sort actuel pénible ; il ne se fit pas d’amis parmi ses nouveaux compagnons. D’ailleurs, les classes terminées, il se hâtait de quitter l’école.

Il est toujours difficile de se remettre à l’étude au lendemain d’un congé plein de charme. Jock éprouvait ce sentiment ; le changement était cruel après les gâteries de