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maintenant que cet être indigne avait en sa possession le secret du trésor et de sa cachette, il désirait acheter Beggarmoor pour entrer en possession de ce qu’il convoitait.

Mais les preuves manquaient à Jock pour créer dans l’esprit des autres une confiance sérieuse en ce que lui croyait si fermement. Tout à coup sa mère interrompit le cours de ses pensées :

« Jock, tu ferais mieux de parler que de demeurer ainsi sans regard et sans vie. Je répondrai, ce soir, à M. Harrison, que nous acceptons l’offre de vente et que nous le laissons libre de régler cette affaire. As-tu autre chose à dire ?

— Oui, certes, car je ne veux pas me défaire de Beggarmoor ; j’en suis et j’en resterai propriétaire.

— Tu es trop jeune, trop déraisonnable pour décider une pareille affaire que tu tranches même sans te souvenir du respect que tu me dois. Tu es sous la tutelle de M. Harrison jusqu’à ta majorité. Si tu te refuses à ce qui est dans ton intérêt, nous agirons sans ton consentement ; plus tard, tu nous en seras reconnaissant !

— J’écrirai moi-même à M. Harrison, répondit l’enfant, avec cet air déterminé et opiniâtre que sa mère prenait pour l’expression de la maussaderie.

— Il est inutile que tu fasses cette démarche. On peut avoir confiance dans l’expérience d’un vieux notaire comme celui-ci ; il ne s’agit d’ailleurs que d’un bien sans valeur ; et quel poids peut avoir l’avis d’un enfant comme toi ? »

Au ton sarcastique de Mme Pole, Jock devint écarlate et ses yeux se remplirent de larmes. Avant qu’il fût revenu à lui, sa mère avait quitté la chambre. En dépit de ce qu’elle lui avait dit, Jock écrivit longuement au vieux notaire. Il le mit au courant de toutes les circonstances relatives à Beggarmoor, et le supplia de rechercher l’ingénieur.

Quand sa lettre fut finie, il la posa sur le bureau de sa mère pour qu’elle en prît connaissance et la mît à la poste. Cela fait, il se sentit rassuré. Certainement, M. Harrison lirait le tout avec la plus grande attention et réfléchirait avant de rien conclure.

« Les femmes, pensa Jock, n’écoutent jamais les raisons qu’on leur donne, et ne jugent que par leurs propres impressions. Molly n’était pas comme cela, elle… »

Et, se rappelant la manière lente, posée, dont sa petite amie examinait chaque question, il résolut de lui écrire le récit détaillé de