Page:Hippocrate - Œuvres complètes, traduction Littré, 1839 volume 1.djvu/22

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postérieurs ; de telle sorte que les écrits hippocratiques demeurent isolés au milieu des débris de l’antique littérature médicale. Cet isolement les agrandit encore et leur donne un lustre et un intérêt particuliers ; ils en ressortent davantage aux yeux du spectateur qui contemple les ruines de l’intelligence : comparables aux édifices qui restent seuls debout au milieu des cités anéanties, et qui paraissent d’autant plus grands et plus majestueux que les rues et les places qui les entouraient ont disparu.

Quand même les écrits d’Hippocrate n’auraient pas d’autre avantage que d’occuper la première place dans l’ordre chronologique de la médecine, ils exciteraient la curiosité de l’homme qui veut s’instruire dans l’ancienne science des peuples. Mais bien d’autres mérites appellent notre attention. Ils ont été placés trop près de l’origine des choses, pour ne pas avoir un type qui n’a plus dû se reproduire dans le cours du temps ; ils ont exercé une trop grande influence sur les destinées de la médecine pour ne pas receler des sources de savoir qui ne sont pas encore épuisées ; ils ont été trop étudiés pour ne pas mériter d’être étudiés encore. Moins que jamais, il est permis à la médecine d’oublier son passé ; de s’enfermer exclusivement dans le domaine de l’observation contemporaine ; de sacrifier au présent les expériences qui ont été faites, les enseignements qui ont été donnés, les pensées générales qui ont été disséminées dans les œuvres des génies éminents ; de laisser dans l’obscurité tant de faits pathologiques qui, produits une fois, ne doivent plus peut-être se reproduire ; de négliger tant de points de vue que le cours des choses toujours divers a présentés ; enfin, de renoncer à l’intelligence de la loi qui a présidé au développement intérieur d’une science aussi ancienne et aussi vaste.

L’existence isolée de la collection hippocratique au com-