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introduction.

comme les hippocratiques, que le corps organisé est un cercle sans commencement ni fin.

Quoique cette dissertation soit déjà longue, je ne veux pas cependant la terminer sans essayer de pénétrer le sens de l’opinion d’Aristote, et de lui rendre pleine justice. Anatomiquement il a tort ; mais plaçons-nous avec lui au point le plus élevé de sa biologie : suivant lui, le cœur est le siége du principe de vie, de la sensibilité, de l’essence de l’animal ; car l’animal est caractérisé par la sensibilité, dit Aristote. Faut-il donc s’étonner qu’il y ait mis la source du sang et l’origine des vaisseaux ? Son idée n’a-t-elle pas été de rattacher à un viscère où il faisait résider le moteur suprême de l’organisation, le fluide et les canaux qui portent partout la vivification ? et ne faut-il pas, pour bien comprendre son idée, la comparer à celle que la physiologie moderne se fait du principe de vie, qui, réveillé, de son sommeil dans l’ovule, par la fécondation, édifie peu à peu tout l’édifice de son corps ?

Cela encore me ramène à ceux des hippocratiques qui plaçaient l’origine des vaisseaux dans la tête. Ils admettaient que toute la sensation, toute l’intelligence, toute l’humanité, en un mot, est dans le cerveau. De là le motif qu’ils ont eu, dans leur ignorance de la circulation, d’adopter la tête comme le point de départ des vaisseaux et la source du fluide vivificateur. C’est, au fond, la même pensée qu’Aristote, à savoir que le sang et ses canaux doivent être mis sous la dépendance du principe même de la vie ; et il faut l’expliquer de même. Seulement je me trouve de nouveau amené à ce résultat, que je ne cherchais pas, mais que je rencontre encore, à savoir que les intuitions sont, en général, d’autant plus justes qu’elles sont plus anciennes. L’origine des vaisseaux, si elle n’est pas dans le cœur, est