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introduction.

marques particulières, des faits sans lien et des observations sans méthode philosophique. L’école hippocratique franchit ce cercle, et par là elle a influé sur l’avenir entier de la médecine dans l’Occident.

La base sur laquelle reposait l’étude de l’état général ainsi conçu n’avait rien d’arbitraire, c’était la comparaison entre la santé et la maladie. Après avoir étudié le jeu régulier du corps vivant, que la gymnastique leur enseignait avec tant de précision, les médecins de l’école de Cos mettaient en regard les phénomènes qui se produisent dans les diverses maladies ; l’état de santé était la mesure d’après laquelle ils en calculaient l’importance et en appréciaient le danger. Dans tout le Pronostic, Hippocrate n’a pas d’autre règle que celle-là pour caractériser l’expression de la face, les sueurs, l’urine, les évacuations alvines, la respiration, etc. Toute étude de pathologie est, à la vérité, fondée sur une comparaison de l’état de santé avec l’état de maladie, mais toute étude de ce genre n’est pas conduite sur le plan que suivit l’école de Cos. Cette école conçoit tout ce qu’elle sait des fonctions dans leur jeu régulier, comme un ensemble, et le compare en bloc à ce qu’elle observe sur l’homme malade ; et de cette comparaison résulte, pour elle, un tableau plutôt qu’une énumération des symptômes ; une étude de l’homme tout entier, plutôt qu’une étude d’un organe lésé ; une recherche des souffrances et des efforts des grandes fonctions, plutôt qu’une recherche des altérations cachées de quelque viscère ; un aperçu de la condition générale du patient plutôt qu’un aperçu de la condition particulière d’un appareil, d’une membrane, ou d’un tissu. Je ne loue pas l’école de Cos d’avoir ainsi agi, cela était inévitable à l’époque où elle était placée ; je ne blâme pas les modernes de s’appesantir sur le diagnostic local, car sans cela il n’y a pas de précision