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Page:Hippocrate - Œuvres complètes, traduction Littré, 1839 volume 4.djvu/652

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decin de ne pas remettre du poison à des tiers et de ne pas, non plus, entrer dans la complicité d’un empoisonnement ; mais en réfléchissant à l’état des choses dans l’antiquité, on sentira combien la société était désarmée contre ce crime : point d’ouverture du corps après la mort, point d’expertise chimique par conséquent il n’était pas possible de saisir le corps du délit, et, à moins que des témoins n’eussent vu administrer le poison, on ne pouvait jamais avoir que des conjectures plus ou moins probables sur la réalité même de l’empoisonnement. Dès-lors on comprend que le Serment ait voulu fortifier ce côté faible de la justice ; cette recommandation, qu’aujourd’hui on n’insérerait pas dans un serment médical, cesse d’être étrange si nous nous faisons une idée exacte de la société antique, et elle indique qu’alors l’habileté à mal faire était supérieure à l’habileté à découvrir le mal.

En définitive, bien que le Serment présente deux difficultés, l’une au sujet du sens de παραγγελίη, l’autre touchant la mention de la lithotomie, on ne peut lui refuser le caractère de la haute antiquité médicale. Il ne renferme rien qui soit en contradiction avec ce que nous savons d’ailleurs sur l’époque hippocratique ; loin de là, plusieurs points concordent d’une manière satisfaisante avec des renseignements puisés ailleurs, et j’ai eu soin de les signaler au lecteur.

VIII. Quel que soit l’auteur de ce Serment (un Asclépiade, sans doute), il a compris combien il importait de donner à la société un gage de sécurité et au médecin un solennel avertissement. On peut affirmer que ce Serment a exercé une influence salutaire et perpétuelle sur la profession médicale. Libanius, au déclin de la civilisation antique, écrivait ceci sur les devoirs du médecin : « Vous qui, désireux d’entrer dans la profession médicale, avez trouvé des maîtres pour vous instruire, adonnez-vous diligemment à l’étude ; soyez humain ; que l’amour de vos semblables vous inspire ; appelé près d’un malade, courez ; arrivé près de lui, examinez-le