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Page:Hirsch - Un vieux bougre, 1908.djvu/132

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UN VIEUX BOUGRE

elle n’en jugeait les actes qu’à l’intensité du frisson dont elle était prise.

Le bien ni le mal n’existaient plus pour elle, s’il s’agissait de Gaspard. Elle ne se demandait même pas s’il était véridique, ou si un être peut avoir accumulé de tels crimes impunément et sans en regretter les pires.

Par ces récits, elle apprenait l’étendue de l’univers, le nom des océans, l’existence d’animaux invraisemblables et la dure loi de la force. Il devenait un dieu fatal qu’elle s’étonnait d’approcher, de servir, d’émouvoir. Et, quand il l’avait éblouie en son âme ignorante et candide, elle exigeait de lui une preuve de servitude qu’il lui donnait sans marchander.

C’est ainsi, par caprice, qu’elle le fit remplacer sa blouse paysanne, son gilet gris à carreaux bruns et son pantalon rayé, par un vêtement complet, de couleur sobre, taillé à l’avant-dernière mode. Il le portait avec une aisance inattendue qui impressionna Mme Naton. Elle en félicita Mlle Youyou et, de cet air pensif qu’ont les pécheresses repenties à l’ancienneté,