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Page:Hirsch - Un vieux bougre, 1908.djvu/19

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UN VIEUX BOUGRE

paysage. Michel, une main dans sa poche, s’efforçait de compter ce qui lui restait d’argent et il regrettait sa dépense.

Ce sentiment prévalait contre les tendresses de Mlle Rubis. Pour ne pas l’avouer, le soldat répétait :

— Faut que j’soye rentré pour l’réveil…

Néanmoins, il accompagna Mlle Rubis dans sa chambre. Un quart de bougie au goulot d’un litre éclairait des hardes fanées pendues contre la porte, un lit défait, deux chaises de paille, une table de bois blanc encombrée d’un col en celluloïd, d’une cuvette, d’un pot à eau où trempait un linge, d’un peigne fin, d’un démêloir brèche-dents, rouge et maculé de poudre de riz. Il y avait une glace fendue, à la muraille, et un éventail déchiré, près d’une chromolithographie : L’Angélus de Jean-François Millet.

— Ah ! nom de Dieu ! c’est bien ça, mes champs ! s’écria Michel.

— T’as envie du pays, mon loup ! dit Mlle Rubis.

Et elle s’offrait par compassion autant que par impatience d’amour.