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Page:Hirsch - Un vieux bougre, 1908.djvu/8

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UN VIEUX BOUGRE

friture dont l’air était embaumé lui donnaient faim ; et il enviait ces gens libres, débraillés et bruyants. Au balcon d’un chalet rustique, une femme, devant une table servie, fumait au nez d’un jeune homme taciturne. Elle était vêtue de piqué blanc et l’immense plume de son chapeau opposait des volutes d’or fauve à l’or blond de ses cheveux teints.

— Sales pékins… y en a que pour eusses ! s’écria Michel.

Cependant, il lui sembla que, de là-haut, descendaient pour lui des parfums et la pensée de complaisances délectables. Il toucha dans sa poche le nœud de son mouchoir où étaient les 30 francs qu’il avait rapportés du pays, et il s’assura s’il n’avait pas perdu sa permission :

— J’suis bon jusqu’au réveil, dit-il ; et, ayant allumé sa cigarette, il alla, joyeux de toute la lumière qui venait d’embraser les arceaux.

Peu à peu, la chaussée se peuplait. Des bandes passaient, jetant des bribes de refrains ou de grosses farces. Les marchands, revenus