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Page:Histoire de Mademoiselle Brion, dite Comtesse de Launay, 1754.djvu/148

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HISTOIRE

ancienne connoiſſance, affermi par une longue habitude, me promettoit de vivre autant que je voudrois avec lui. Une idée libertine, un moment de temperament, me fit tout hazarder, fortune & réputation. Il eſt des inſtans où rien ne coute pour ſe ſatisfaire, où la voix de l’honneur n’eſt plus entendue, où la vie même ne paroit d’aucun prix devant une forte paſſion ; la vertu quelquefois ſe tait : on ne cherche point d’exemple, quand on ne prétend point ſe juſtifier : un aveu que le préjugé ſeul rend honteux chez moi, n’a point beſoin d’excuſe. Un deſavantage qu’on retire de la philoſophie, eſt d’apprendre à ne point rougir mal à propos.

J’étois ſervie par un grand domeſtique, jeune, bien fait & d’une jolie figure, dont l’air diſtingué démentoit en tout l’état & la naiſſance ; ſes attentions, le plaiſir qu’il prenoit à me ſervir, me