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Page:Histoire de Mademoiselle Brion, dite Comtesse de Launay, 1754.djvu/82

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HISTOIRE

mais que ſi je perdois, il me propoſoit ma revenche. Voyant qu’il falloit céder à la force, je voulus du moins mourir comme je m’étois défendue, & périr en Romaine. Le poignard étoit levé, je volois au devant de la mort. Percée de mille coups, j’adorois en expirant, le vainqueur qui me les portoit : mon ame étoit prête à m’abandonner ; j’ouvrois une foible paupiére pour jouir en expirant, du plaiſir de mourir vengée. Mon cher ennemi frappé des mêmes coups qu’il me portoit, ſembloit même, en triomphant, me demander grace. J’entendis bientôt mon vainqueur ſoupirer ; un même inſtant confondit nos deux ames. Quels momens, grands Dieux ! Pour en connoître le prix, il ne ſuffit pas d’avoir joui, il faut avoir aimé. Tendres Amans, ce n’eſt qu’en vous les rappellant, qu’on peut vous les peindre.