Aller au contenu

Page:Histoire de l'Académie Royale des Sciences et des Belles Lettres (1746).djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

les Siecles les plus reculés n’avoient pas laissé d’exceller en toutes sortes d’arts & de sciences, comme Promethée, Orphée, Hesiode, Epimenide Homere, Thamyris, Eumolpe, Melampe, Aristophane & autres. On voit dans Suidas quels etoient les sentimens d’Orphée sur la production de l’univers. Il disoit qu’au commencement l’ether parût, ayant été façonné par la Divinité. L’Ether avoit d’un côté & d’autre le Chaos. Une nuit affreuse dominoit par tout, & cachoit ce qui etoit au dessous de l’ether. L’ether s’etant echauffé avec le chaos, il en provint un grand oeuf, qui ayant été couvé par la nuit, s’ouvrit & se separa en deux parties, la partie etherienne tira vers le haut comme etant la plus legere, au lieu que la partie la plus solide & la plus pesante tint le bas ; & c’est de celle ci que les cieux & la terre tirent leur origine &c. Mais ce sont là des fictions, qui passent sans contredit tout le merveilleux Poëtique.

Homere, quoiqu’il passe pour le plus excellent de tous les Poëtes, n’a pas donné dans de semblables fictions ; au contraire il parle en Philosophe lorsqu’il dit : ὦκεανός ὄσπηρ γένεσις παντέσσι τετύκται[1] ; c’est-à-dire, l’Ocean, ou l’eau dont toutes choses tirent leur origine. On pretend au reste, qu’Hesiode & Aristophane avoient adopté le Visions d’Orphée.

Thales Auteur de la Secte Jonique, tient le premier rang par son ancienneté entre les Grecs qui se sont appliqués avec le plus de fruit à l’êtude de la Philosophie. Il raportoit à l’eau la production de toutes choses. Diogene Laërce[2] & Ciceron + assurent, que ce Philosophe ajoutoit, que Dieu etoit l’esprit qui avoit tiré toutes choses de l’eau ; Deum, ce sont les paroles de Ciceron, eam mentem esse, qui ex aqua omnia fingeret. c’est selon les apparences ce qu’Anaximandre a voulu indiquer par le mot de τὸ ἄπειρον. Il disoit selon

  1. Iliad. 14. v. 246.
  2. in Vit. Thalet. + cic. Acad. Quest. L. 4. c. 118.